Photographe, sérigraphe, graveur … Aurélien Benoist travaille la technique mixte autour de l’image.
L’Auteur rencontre son sujet.
Le convoite.
Le délaisse.
S’y confronte à nouveau.
Le sujet échappe, l’Auteur veut s’y fondre.
Une heure. Une heure après une heure. Les heures après les heures.
Cette intimité crée l’oeuvre.
Dans l’exaltation ou la douleur,peu importe, naît ce territoire nouveau qui demande à être comblé, peuplé :
“L’oeuvre m’attend quelque part, comme on attend Le Roi ! “... mais rien ni personne ne l’attend.
L’auteur sait depuis toujours qu’il ne parle qu’une langue d’exil.
Son art n’est qu’un miroir peuplé d’ombres et de couteaux aux paupières closes.
Il doit donc raconter l’inénarrable…
Â
Voici, l’histoire commence ainsi : “J’arrive à la ville. Pour y verser ma vie.
Je monte la rue, comme un Géant. CA C’EST LA VILLE ET CA C’EST MA VIE “.
Â
Est-ce le jour qui décline lentement et qui donne à ton visage cette lumière, si fragile que je ne connaissais pas ?
Ne part pas, s’il te plaît, les heures cessent.
Â
Sous mes pas de géant, la ville n’arrête pas de s’agiter.
Une femme aux épaules trop frêles portant un trop lourd manteau.
Ce train qui passe au loin, muet.
Cet oiseau qui boit dans la flaque.
Des amoureux.
Ce chemin dans le parc.
Mon ombre sur le bâtiment.
Ton odeur. Ton odeur mon amour, lorsque tu me frôles.
Le bruit de ta robe et le bruit des arbres.
Celui de mes pas. Le parc.
Ce taxi n’est pas pour moi.
Des gens.
Des mots, tous divers, tous bien frottés de sens.
Des communications. Par milliers. Des milliards de communication à la seconde. Paris. New York Moscou. Bari. Castrovillari…...Et la roue fracassée.
Et moi, qui ne parle que d’une langue d’exil.
Malgré tous nos efforts pour l‘épuiser comment la Ville trouve-t-elle encore la force de grandir ?Â
JE CHERCHE LE SILENCE. Je ne parlerai pas de ces bruits de la Ville.
Â
J’ai fait trois pas et la Ville s’est tut.
Mon âne qui boit et moi qui le regarde boire.
Mon âne qui boit et moi qui le regarde boire.
Mon âne qui boit et moi qui le regarde boire…
Â
La route se tait.
Le chemin d’Ahuy. La friche…. Et cette ligne blanche. Au loin. Une ligne blanche ?
La route se tait. Ce terrain de jeu, désert. Ce centre commercial. Vide;
Ce parc. Ce parc. La lumière dans les branches et ton odeur quand tu me frôles, mon amour.
Â
Ma langue d’exil. Silencieuse. Désertée.
Mon âne boit et moi qui le regarde…..
Â
Et la roue fracassée.
Les cadavres de cabines téléphoniques. Des millions de communications à la seconde, Paris Moscou New York, Castrovillari…et les squelettes des cabines.
Mon ombre de Géant sur le bâtiment des Minoteries.
Des millions d’animaux qui boivent aux Tanneries. Les cadavres des animaux et le cadavre du territoire.
Les ombres. Miroir d’ombres et de couteaux aux paupières closes.
Â
Mon âne boit et je le regarde. On ne m’attend pas quelque part.
Titus Le Pèse Nerf